Le rapport du Ministère des armées : "Le problème n’est pas ' la Chine '...

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Avec ce pavé de 646 pages, paru le 20 septembre sur le site de l’Institut de Recherche Stratégique de l’École Militaire du ministère des Armées, (Irsem), c'est la lumière qui semble avoir gagné un peu sur l'obscurité et sans doute y aura-t-il un avant et un après.


Publié au terme de deux années de recherches Les opérations d’influence chinoise – un moment machiavélien (https://www.irsem.fr/) , illustre de façon exhaustive, comment le Parti communiste chinois (PCC) influence et infiltre, avec pour champ d'application le monde entier, ce par le biais d’une « nébuleuse d’intermédiaires » : diasporas, médias, diplomatie, économie, politique, éducation, think tank, culture ...


Les auteurs, le directeur de l’Irsem, Jean-Baptiste Jeangène-Vilmer et son directeur du domaine « Renseignement, anticipation et menaces hybrides », Paul Charon, avertissent toutefois d’emblée que « Le problème n’est pas « la Chine », elle n’est pas un « ennemi » (c’est au contraire le Parti qui divise le monde en « amis » – ceux qui défendent ses intérêts – et « ennemis » – ceux qui osent le critiquer), […] Le problème, comme le résume l’historien Frank Dikötter, est que « le PCC reste, structurellement, un parti unique léniniste [qui] cherche à saper toute opposition tant au pays qu’à l’étranger » ».


Ces informations ne sont (pour nous) pas nouvelles , mais la légitimité de la source indique qu’au sein d'institutions infiltrées, il reste des esprits suffisamment intègres pour opposer officiellement les faits à la propagande, la manipulation, la guerre de l’information auxquelles se livre le gouvernement chinois en France et dans le monde.


Un rapport a été publié par l'Institut de recherche stratégique de l'école militaire française (IRSEM) le 20 septembre.

« l’une des priorités de Pékin dans le monde est de lutter contre les « cinq poisons », donc de museler les avocats des Tibétains, des Ouïghours, de l’indépendance de Taïwan, les promoteurs de la démocratie en Chine et les membres du Falun Gong » peut on y lire.


Sont réunies ici quantité d'informations détaillées, rarement si ce n’est jamais révélées par la presse mainstream, ou reconnues pas les institutions, influence et infiltration obligent, sur la persécution du Falun Gong, un des « cinq poisons » . Le Falun Gong y étant évoqué pas moins de 79 fois.


En voici un panorama :

Le Bureau 610

    - « Les activités de (la) gymnastique spirituelle rassemblent alors des dizaines de millions d’adeptes y compris à des rangs élevés du PCC. Jiang Zemin y décèle une menace pour la survie du Parti qui ne peut tolérer l’existence d’une structure sociale hors de son contrôle.

    - Parmi « les acteurs principaux mettant en œuvre les opérations d’influences chinoises » figure le « Bureau 610, qui a des agents dans le monde entier agissant en dehors de tout cadre légal pour éradiquer le mouvement Falun Gong »

    - « Le Bureau 610 est une structure particulièrement occulte en charge de la lutte contre le mouvement Falun Gong (法轮功) … L’origine de ce bureau remonte à 1999, lorsque Jiang Zemin décide, le 7 juin, de provoquer une réunion extraordinaire du Bureau politique du Parti afin de prendre des mesures contre la montée en puissance spectaculaire du mouvement Falun Gong au sein de la société chinoise »

    - « le Bureau 610, qui compterait environ 15 000 personnes sur l’ensemble du territoire chinois et à l’étranger agit en dehors de tout cadre légal pour éradiquer le mouvement Falun Gong. Il y a notamment un membre du Bureau 610 dans chaque mission diplomatique chinoise, dont la mission est de détecter, ficher et persécuter les adeptes de ce mouvement, tout en menant des actions de propagande en direction des gouvernements étrangers pour les dissuader d’entretenir des relations avec eux. »


Le rapport en cite divers exemples :

    - « Il y a de nombreux cas documentés d’autocensure. En 2008, l’université de Tel Aviv a décidé de fermer une exposition consacrée au mouvement Falun Gong à la demande de l’ambassade de Chine.

    - Dans un autre secteur, celui du théâtre, les diplomates chinois tentent régulièrement de faire interdire des représentations qu’ils estiment contraires aux intérêts du PCC. Par exemple, en 2017, l’ambassade de Chine a fait pression sur le Théâtre royal danois pour empêcher une représentation de la compagnie de danse Shen Yun, liée au Falun Gong. Parfois, la contrainte est tellement internalisée par les partenaires de la Chine qu’elle n’a même plus besoin d’exercer une pression, les autorités locales s’en chargent pour elle.

    - Achat d’un message ponctuel. L’objectif est de faire publier par des tiers crédibles un message pré-rédigé. Cette pratique est utilisée en ligne comme hors ligne. Par exemple, en avril 2020, un intermédiaire propose 20 000 pesos (environ 200 euros) aux rédacteurs en chef de plusieurs journaux argentins – dont El Cronista Comercial, Diario Popular et la plateforme en ligne Infobae (qui aurait demandé un prix plus élevé, qui n’a pas été accepté) – pour publier un article anti-Falun Gong « écrit dans un mauvais espagnol » et qui contient de nombreuses fausses informations sur cette pratique dans le but de la discréditer dans l’opinion argentine. Le texte prétend notamment que les pratiquants du Falun Gong en Argentine ne s’autorisent pas à consulter de médecin ni à se faire soigner à l’hôpital, suggérant ainsi, dans le contexte de pandémie de Covid-19, qu’ils ne chercheraient pas à se déclarer dans le cas où ils seraient porteurs du coronavirus, et mettraient donc le reste de la population en danger. « Que se passera-t-il », interroge l’article, « si un large nombre de ces pratiquants refuse de solliciter les services médicaux au milieu d’une pandémie mondiale ? » L’article reprend les expressions calomnieuses et diabolisantes généralement employées par la propagande chinoise pour qualifier le Falun Gong, de même qu’il reprend une version des faits fallacieuse pour présenter son histoire.

    - Usurpations d’identité. Les attaquants ont notamment envoyé des courriels insultants à des ministres et parlementaires en se faisant passer pour des membres du Falun Gong dans le but de discréditer ces derniers. C’est une pratique courante et non limitée au Canada, comme l’explique une membre de l’association canadienne de Falun Gong : « des fonctionnaires gouvernementaux de tous les niveaux dans de nombreux pays ont été systématiquement et à plusieurs reprises visés par des courriels frauduleux de personnes prétendant être des pratiquants de Falun Gong. L’expéditeur se montre souvent obsessionnel, irrationnel et impoli, donnant ainsi une légitimité aux affirmations du régime chinois selon lesquelles le Falun Gong est une menace pour la société […]. Certains de ces courriels ont été attribués à des adresses IP originaires de Chine »

    - Autre exemple : en mai 2019, Le Youtubeur canadien J.J. McCullough (250 000 abonnés), qui n’est pas particulièrement pro-chinois (au contraire, même), a reçu un courriel d’un certain « Franco » lui proposant 500 dollars (puis 1 350) pour diffuser une vidéo anti-Falun Gong – une offre que non seulement il a refusée mais à laquelle il a consacré une vidéo intitulée « Chinese propaganda and me»

    - Pékin n’a autorisé la chaîne de télévision taïwanaise TTV à installer des bureaux dans plusieurs villes chinoises dont Pékin qu’à la condition de cesser la diffusion d’une émission sur le Falun Gong. Cette demande a d’ailleurs eu un effet d’autocensure immédiat puisque, depuis cet instant, « la plupart des médias taïwanais prévoyant d’entrer sur le marché chinois sont devenus réticents à produire des reportages et des programmes télévisés sur le Falun Gong ».

    - Enfin, la Suède – qui a reçu le dalaï-lama en septembre 2018 – est un asile pour les réfugiés ouïghours, tibétains et Falun Gong, c’est-à-dire les cibles principales de Pékin, Pour Pékin, l’objectif est alors de faire plier la Suède, en limitant sa liberté d’expression, notamment sur les « cinq poisons », et au passage d’envoyer un avertissement aux autres pays, en particulier européens. Mais cela a totalement échoué puisqu’au lieu de plier, la Suède a résisté et la conséquence a simplement été la dégradation des relations bilatérales et de l’image de la Chine en Suède.


Les pratiquants de Falun Gong sont également victimes depuis 1999 de prélèvements forcés d’organes pour alimenter un vaste réseau de transplantation international. Un crime d'une extrême gravité qui dure depuis 22 ans sans que pratiquement aucun média grand public ne l'ait honnêtement rapporté. On peut lire à ce sujet dans le rapport de l'Irsem :


Contrôler et façonner le discours sur le trafic d’organes

    - Le PCC « supervise la plus vaste entreprise étatique de trafic d’organes dans le monde : il est à peu près certain qu’un grand nombre d’organes sont extraits de prisonniers d’opinion [qui sont] exécutés à la demande pour des clients payants ». Si cela ne suscite à peu près aucune réaction internationale et si, ironiquement, la Chine a même contribué à créer la task force de l’OMS contre le trafic d’organes ou encore à placer un représentant à la tête de la Transplantation Society (TTS), c’est parce qu’elle réussit à contrôler et façonner le discours sur ce sujet, avec trois objectifs selon Matthew Robertson : « protéger la sécurité politique et la légitimité du régime de l’accusation selon laquelle il exploite systématiquement les prisonniers d’opinion comme source d’organes ; garantir la disponibilité continue d’organes de transplantation pour les membres de l’élite du parti ; renforcer l’image de la Chine sur la scène mondiale en tant que chef de file dans un domaine avancé de la médecine, tout en préservant le prestige et l’accès des chirurgiens chinois aux revues médicales occidentales, aux conférences et aux sociétés professionnelles». Et, de ce point de vue, force est de constater que le PCC a plutôt réussi : l’OMS comme la TTS contribuent à diffuser le discours selon lequel la Chine a cessé ces pratiques depuis 2015, date à partir de laquelle les prélèvements seraient volontaires (en dépit du fait qu’il a été prouvé que Pékin falsifie les données concernant cette transplantation volontaire).


Ce ne sont que quelques informations contribuant à la vision d'ensemble des Opérations d'influence chinoise, qui pourraient faire l'objet d'encore bien des articles. Elles peuvent toutefois inciter certains à la prudence et leur éviter de se retrouver malgré eux, impliqués dans des crimes toujours en cours, et aider à sauver des vies en Chine.

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